En bref
- Très bon, mais...
- Frustrant
Présentation
Dawn of man est un city-builder du paléolithique. Le jeu se concentre sur la période couvrant les débuts de l'industrie lithique (l'âge de pierre) jusqu'à l'âge de fer, et le rôle du joueur sera de s'assurer que la poignée d'humains disponibles au début se développe en une colonie prospère.
Configuration
Testé sur mon Mac mini M1 et sur ma machine de jeu sous NixOS. Tourne bien sur le M1, à condition de faire des concessions sur la qualité graphique (en tout cas en 3K).
Mécaniques de jeu
Disons-le tout de suite : Damn of man n'est pas un jeu très profond. Il y a quelques mécaniques simples - et d'autres un peu moins évidentes -, un peu de micro-management, mais ça s'arrête là. Ce n'est pas un jeu "prise de tête", bien qu'il requiert un peu de planification. Je m'en suis très bien sorti du premier coup parce que c'est un jeu pile dans mes cordes, mais je peux comprendre que certaines mécaniques soient rebutantes pour certains.
Le but est de gagner des points qui permettent de débloquer des technologies. Ces points sont gagnés en accomplissant certains objectifs, tels que récolter des ressources, construire des bâtiments, ou atteindre une certaine population. Chaque technologie débloquée permet, évidemment, d'améliorer la qualité de vie de la colonie. Il en résulte un arbre de technologies somme toute assez classique, et assez peu fourni, quoique plutôt équilibré.
La période couvrant une partie s'étend donc de l'âge de pierre à l'âge de fer et se divise en six ères ; le déblocage d'une technologie spécifique permet de débloquer l'ère suivante.
DoM présente une "difficulté" particulière qui ne siéra pas à tout le monde : il faut équilibrer consommation et production de ressources, et y aller progressivement. Ce n'est pas un bac-à-sable où on lance des milliers de constructions en même temps sans aucune incidence. Ici, la gestion des tâches individuelles des membres de la colonie est importante et semble avoir mal été comprise par certains membres de la communauté Steam qui déplorent (parfois avec humour) une "piètre gestion des priorités". En réalité, c'est précisément ce qui fait l'intérêt de DoM : l'action se déroule au paléolithique, où la main d'oeuvre n'est ni abondante ni inépuisable.
On a pris l'habitude avec les city-builders modernes de sélectionner de larges portions de terrains pour y réaliser des constructions avec pour "seule" limite l'argent : la richesse de ces jeux est ailleurs. En ce qui concerne DoM, c'est exactement l'inverse : il n'est jamais question d'argent, mais il est toujours question de répartition des tâches. Chaque construction de la moindre maison ou de la moindre parcelle agricole sera réfléchie, non seulement parce que les ressources n'abondent pas mais aussi parce que la saisonnalité a son importance.
Une mécanique particulièrement intéressante de DoM est celle des saisons. Chacune d'entre elles apporte ses propres effets, positifs comme négatifs. Outre, évidemment, l'aspect esthétique du monde, certaines ressources ne peuvent être récoltées que pendant l'été, d'autres uniquement en automne. Certains fruits se récolteront au printemps, d'autres exclusivement en hiver.
Vers le milieu de partie, on devra, par exemple, faire attention au moment où l'on déclenche la construction de bâtiment en paille, étant donné que celle-ci n'est récoltable qu'en été ou en automne (en fonction des plantations qu'on a choisi de faire). Et ce d'autant qu'il faut compter une réserve pour nourrir les bêtes.
Et j'insiste : pour moi, c'est ce qui fait toute la richesse de Dawn of Man. Ce sont des mécaniques qui sont naturelles et pourtant oubliées de nos jours. Je trouve que d'une certaine manière, le jeu nous reconnecte à une réalité historique à laquelle nous nous sommes déshabitués.
En plus des saisons, la colonie devra faire face à différents climats. Évidemment, l'hiver est froid, et les morts par hypothermie seront monnaie courante jusqu'à ce que vous puissiez fabriquer des vêtements appropriés. Des tempêtes sont à craindre au cours de l'année : les colons, mais aussi les bêtes, sont susceptibles de mourir foudroyés.
Au-delà de l'équilibre production/consommation, il faudra compter avec des raids de pillards. Régulièrement, un peu à la manière d'un tower-defense, un groupe de pillards de plus en plus important et de mieux en mieux équipé viendra taquiner votre colonie, s'en prenant sans vergogne à vos animaux et à vos bâtiments. Il faudra donc, en plus de tout le reste, s'assurer de la protection de la colonie avec des bâtiments défensifs judicieusement placés.
En plus des pillards, certaines bêtes sauvages se montreront plus hostiles que d'autres. Il est possible (moyennant la découverte de la technologie correspondante) d'apprivoiser certains animaux, mais d'autres attaqueront et tueront les membres de la colonie, en particulier les enfants et les animaux de ferme.
Quelques points négatifs
Premier reproche que j'ai à faire à DoM est son "abandon", tant par la communauté que par les développeurs. Il n'est pourtant sorti qu'en 2019. Mais cette critique est à relativiser : les concepts du jeu sont bien implémentés, et il me semble exempt de bugs.
Ce qui m'amène au second reproche : bien que bien réalisé, il m'a semblé assez mal optimisé. Les temps de chargement sont plutôt rapides, au contraire des temps de sauvegarde qui, selon des critères modernes, me semble très longs, en particulier pour des "quick-save". En outre, les FPS sont inversement proportionnelles à l'extension de la colonie : plus elle est grande, plus le jeu est lent - graphiquement.
Je compare avec Civilization V et VI : graphiquement, les FPS sont stables du début à la fin du jeu (par contre on sent qu'en fin de jeu, le CPU est de plus en plus fortement sollicité). Il est évident que le moteur graphique de DoM est un goulet d'étranglement, alors que le CPU semble bien maîtrisé. Ceci dit, sur ma machine, je passe de 100FPS ("VSynced", donc probablement plus sans synchro verticale) en début de partie à 60+ en fin de partie avec plus de 200 habitants et autant d'animaux. Ce n'est donc pas rédhibitoire.
Pas rédhibitoire non plus : le fond utilisé pour l'animation d'introduction n'est pas fait pour ma résolution. C'est probablement le ratio qui pose problème (21:9), qui cause des bandes noires sur les côtés. Mais ce "problème" n'est visible que dans le menu principal du jeu et n'existe pas en cours de jeu. En outre, ça doit concerner moins d'1% des joueurs...
La faune sauvage est assez diversifiée, surtout considérant qu'elle change au cours des saisons et des époques (certaines espèces disparaissent, d'autres leur succèdent). Au contraire des paysages, malgré le changement saisonnier : j'ai été un peu déçu du manque de variété des environnements. C'est toujours une rivière ou un lac, plus ou moins de montagnes ou de collines, et de la forêt à perte de vue. Ça manque un peu de plages, de palmiers, de déserts, de savanes.
J'aurais aimé un arbre des technologies plus touffu. Je dois dire, cependant, qu'il est assez bien équilibré. On le complète ni trop vite, ni trop lentement. Mais des étapes intermédiaires auraient peut-être rendu le jeu encore plus riche et intéressant.
Cet arbre est grevé d'un autre problème un peu plus embêtant : on ignore plus ou moins ce qu'on débloque. La description s'avère parfois trompeuse : on a l'impression d'avoir débloqué une technologie alors qu'en réalité, on a juste ouvert la voie à la technologie suivante. Après quelques parties, on n'y fait plus vraiment attention, mais au début, ça peut être perturbant.
Compte tenu du travail manifeste sur le respect des pratiques du paléolithique (en faisant toutefois quelques concessions inhérentes au contexte d'un jeu vidéo accessible et agréable à jouer), j'aurais adoré avoir un genre de "Civilopédia" : un encart informatif, optionnel, permettant d'avoir des informations historiques de qualité encyclopédique, ou en tout cas à caractère informatif, sur chaque technologie, bâtiment, etc. Cela aurait poussé d'un cran l'intérêt culturel du jeu, mais je concède que le travail aurait été très - trop - important pour un studio comme Madruga Works (en particulier concernant les traductions).
Enfin, la fin de jeu est frustrante. Une fois qu'on a débloqué toutes les technologies, il n'y a plus grand chose à faire. Il est toujours possible d'étendre la colonie "à l'infini", mais il n'y a plus vraiment de challenge. En pratique, on est de toute façon bornés par le paysage. Alors on va sur le workshop et on commence à télécharger quelques scénarios pour y découvrir des cartes plus grandes et plus plates, permettant ainsi des colonies plus vastes. Malheureusement, le choix reste assez spartiate.
On aurait pu envisager plusieurs cas de figures pour la fin de partie :
- Pouvoir créer une autre colonie sur une autre carte du même scénario, et permettre des échanges entre colonies (pour remplacer le marchand qui est assez casse-couilles en plus d'être cher)
- Afficher une cinématique montrant une colonie prospère avançant dans les âges pour devenir une cité, puis une ville, et demander au joueur s'il veut continuer ou démarrer une nouvelle colonie
- Afficher des statistiques de la partie en cours, des comparatifs avec d'autres joueurs ou avec les parties précédentes
- etc.
Conclusion
À moins de dix euros (acquis à la faveur des soldes d'hiver de Steam), je considère que Dawn of Man est un excellent jeu. Ses mécaniques le rendent particulièrement intéressant à plus d'un titre. Néanmoins, alors que le début et le milieu de partie sont satisfaisants (avancer dans les âges est gratifiant), la fin de jeu est frustrante.
Malgré un potentiel de rejouabilité immense (le jeu de base demande de créer une trentaine de colonies, il y a des modes "défi" ainsi que les scénarios de la communauté Steam), DoM sera probablement délaissé après une soixantaine d'heures de jeu, ce qui reste honorable. En soldes, le ratio prix/heures de jeu me semble convainquant, et m'incite à recommander le jeu.
En vrai, j'espère un Dawn of Man 2 beaucoup plus ambitieux, avec beaucoup plus de variété dans les paysages et les technologies (tout en restant dans le thème historique), des colonies plus vastes et interconnectées (pas forcément en ligne), un meilleur moteur graphique, et une fin de partie plus intéressante. Mais je doute qu'un tel jeu sorte un jour.
En tout cas, bravo à Madruga Works pour leur travail sur Dawn of Man qui mérite des éloges !