Prehistoric Planet Planète préhistorique

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Un bébé Velociraptor

La BBC et Apple TV nous offrent là la meilleure série documentaire consacrée aux dinosaures, tout simplement.

Bien que ce soient Tyrannosaurus et Mosasaurus qui ouvrent les festivités, la série ne nous fait pas l'affront de se concentrer sur les espèces connues. Certes, il faut attirer du monde avec les espèces popularisées par le cinéma (au hasard, Jurassic Park), mais Prehistoric Planet donne beaucoup plus à voir, et pas seulement des dinosaures.

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De nombreux environnements sont explorés, dont les océans. Ici, Xiphactinus, poisson osseux colossal

D'emblée, la série impressionne sur le plan technique. Les animaux sont modélisés avec une précision parfois supérieure aux derniers épisodes de la saga cinématographique qui m'est si chère, et une acuité scientifique totale au regard de nos connaissances actuelles.

Les dinosaures de Jurassic World correspondent à une certaine esthétique issue de l'histoire racontée dans les films, assumant avoir perdu cette acuité de façon délibérée. Ici, leur aspect est parfois bien différent, les rapports de taille aussi, et c'est tant mieux. Je disais, au sujet de Dominion - Prologue :

ce n’est pas un documentaire

Prehistoric Planet, au contraire, est un documentaire d'histoire naturelle de la BBC, tout ce qu'il y a de plus authentique, narré par Sir David Attenborough (l'un des plus grands naturalistes de notre temps, mais aussi le frère de Richard qui a interprété John Hammond dans... Jurassic Park).

Les animaux sont mis en scène dans des environnements et des situations variés et inattendus, poussant à l'émerveillement constant, et réussissant un pari audacieux : piquer la curiosité, même des amateurs les plus érudits. L'écriture nous amène constamment dans l'erreur, sur de fausses pistes, avant de nous faire découvrir une réalité insoupçonnée ou simplement surprenante.

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Des Isisaurus en quête d'un site de nidification

La série semble porter un intérêt particulier au renversement des idées reçues (ce qui est un peu son rôle en tant que documentaire) et des préjugés. L'exploration de parades nuptiales ou du comportement parental des grands carnivores nous donne à voir ces animaux sous un jour nouveau, épuré des traditionnelles bastons titanesques (qui fonctionnent bien dans les films mais qui passent un peu moins bien dans un documentaire). Il est certain que les conflits internes aussi bien que la prédation sont évoqués, mais c'est bien tout un éventail de comportements qui sont mis en avant ici.

Et cela confère à ces animaux des personnalités bien différentes de ce que la fiction seule nous laisse penser. Bien sûr, un amateur éclairé connaît déjà ces comportements, mais Prehistoric Planet leur donne corps. La série matérialise ce qui nous est inaccessible autrement que par l'imagination, et à ma connaissance, elle le fait bien.

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Les Tyrannosaurus aussi font des câlins

Mélangeant habilement prises de vues réelles et modèles 3D d'une précision inégalée, on a le sentiment que l'on pourrait approcher ces animaux, les toucher, à un degré encore jamais atteint. Et cela n'est pas dû qu'à l'aspect esthétique : ce sont bien leurs comportements et les situations dans lesquelles ils sont mis que ces animaux semblent "réels", presque contemporains.

La comparaison est insultante, mais Prehistoric Planet est à un zoo ce que Jurassic Park est à un cirque. L'un - devrait - servir la culture, l'autre sert le spectacle. Les deux sont complémentaires, ne poursuivent pas les mêmes objectifs, et intéressent des populations différentes. On peut évidemment s'intéresser aux deux, il n'y a pas d'exclusivité mutuelle ici.

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Hatzegopteryx paradant sur la plage

Notons que la musique est signée Hans Zimmer. Je ne me risquerai par à comparer avec John Williams, d'autant que là aussi, la musique sert d'autres objectifs dans un documentaire que dans une fiction. Je dirai simplement qu'en dehors du thème principal (qui reste facilement en tête), elle se fait très discrète. Elle est épique quand elle le doit, et respecte la narration.

À l'heure où j'écris ces lignes, deux saisons de cinq épisodes d'une quarantaine de minutes sont disponibles sur Apple TV+. Les épisodes de la seconde saison ont été complétés de mini-documentaires de quelques minutes approfondissant un sujet particulier abordé dans l'épisode concerné, faisant intervenir les scientifiques dans des séquences de type question/réponse. J'aime bien ce principe parce que ça évite de casser l'immersion pendant l'épisode.

Au final, Prehistoric Planet se regarde comme n'importe quel documentaire animalier. Mais la série nous évite la facilité et l'oisiveté de n'aborder que ce qui est déjà connu, et de le faire de façon convenue. En seulement dix épisodes, et bien qu'étant un dino-nerd, j'ai appris l'existence de certaines espèces mentionnées, j'ai découvert des comportements inattendus (en particulier chez Dreadnoughtus ou Tuarangisaurus), j'ai été pris d'une nouvelle affection pour des espèces abondamment décrites, fasciné par la parade nuptiale des Hatzegopteryx, touché par le destin tragique de certains Isisaurus. Bref, je suis conquis, presque sans surprise finalement !

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Un groupe de Dreadnoughtus