L'Humain, cette espèce primitive La censure des sciences

Sommaire

Parmi les objectifs de certaines disciplines de la science, il y a l'exploration de l'univers, et la recherche des origines de la Vie. Si l'hypothèse couramment acceptée aujourd'hui est que la Vie est née dans l'eau, que des organismes unicellulaires sont apparus, puis se sont multipliés avant de devenir multi-cellulaires, puis de devenir des bactéries qui se sont complexifiées avec l'aide du temps pour aboutir aux poissons puis aux amphibiens, puis, enfin, aux créatures terrestres et aviaires, pendant très longtemps on ne s'est tout simplement pas posé la question de savoir d'où l'on venait, ni même d'où venaient toutes les créatures qui nous entouraient, et dans lesquelles on puisait notre alimentation, persuadés que c'était là une source intarissable de nourriture.

Jusqu'à ce que nous formulions l'idée que tout cela devait provenir d'une ou plusieurs entités bienfaisantes, supérieures à toutes choses. Ces entités devaient forcément être d'une grandeur sans pareil, et d'une générosité infinie pour avoir tant créé : des poissons, des oiseaux, des plantes, des arbres, des mammouths, des ours, l'eau, l'air, le tout en quantité apparemment infinie, et même la terre que nous foulons, et ces disques lumineux qui bougent dans le ciel. Ainsi naquirent les croyances et les religions, qui expliquèrent l'inexplicable.

Encore aujourd'hui subsistent un certain nombre de croyances, y compris concernant des faits attestés par la science. Il faut, toutefois, un certain temps avant que les dogmes religieux ne soient supplantés par la véracité scientifique: l'héliocentrisme, c'est-à-dire la théorie selon laquelle la Terre tourne autour du Soleil, déjà évoquée par Aristarque de Samos en 280 avant notre ère mais désavouée par Ptolémée dans son Almageste1 au IIème siècle, dut attendre Nicolas Copernic en 1513 pour disposer d'un modèle théorique, affiné ensuite par Johannes Kepler en 1609, pour enfin être observé et confirmé par Galilée quelques années plus tard. Mais malgré les preuves irréfutables que la science dressait devant leurs yeux, les pouvoirs en place, très soumis à l'influence religieuse, firent censurer Galilée, puis le firent condamner assigné à résidence jusqu'à sa mort. Ce n'est finalement qu'un siècle plus tard que la thèse de l'héliocentrisme est définitivement acceptée.

Mais malgré notre avancement scientifique, malgré nos capacités modernes de communication, et malgré l'émancipation de la science, une étude de la National Science Foundation2 américaine révèle 3 des chiffres inquiétants: 34% des Européens, 30% des Indiens, 28% des Malaisiens, 26% des Américains et 14% des Sud-Coréens pensent encore que c'est le Soleil qui tourne autour de la Terre.

Notre culture moderne pose, en outre, deux problèmes majeurs qui font obstacle à la progression de la science. D'une part, la monétisation de la science. Au cours des XVIIème et XVIIIème siècles, on commence à voir apparaître les notions de brevet et de propriété intellectuelle, concrétisant ainsi des siècles d'obscurantisme, ce qui conduisit progressivement à la fermeture de la science: elle n'est plus accessible à tous, seulement à ceux qui payent, au point qu'aujourd'hui, certains sites Internet (que je ne mentionnerai pas ici) sont fermés par les autorités judiciaires au motif qu'ils diffusaient librement des informations scientifiques en violant les droits d'auteur. Il faut ouvrir la science à tous, et heureusement, il existe des initiatives 4 qui vont en ce sens, mais pour que nous puissions continuer à évoluer, elles devraient ne pas être que des initiatives : la science ouverte doit être la norme.

D'autre part, nous sommes focalisés, à notre époque, sur deux concepts sociaux : le racisme et le sexisme. Il est certains que ce sont des problèmes qu'il faut traiter urgemment, en particulier si l'on cherche à unifier les sociétés humaines. Toutefois, on doit se poser la question de la pertinence du rejet de certaines théories au simple motif qu'elles soient racistes ou sexistes. Je veux dire par là que ni le racisme, ni le sexisme ne devraient être sujets à polémique dans le cadre de concepts scientifiques énoncés antérieurement à notre société actuelle. Oui, il y avait, fut un temps, une science "racisée" : Buffon, dans son Histoire naturelle, considérait possible la reproduction entre un singe et une femme noire, mais aussi que l'Homme était une créature divine. Contextuellement, dans la société d'alors, ce postulat était cohérent avec la perception que nous avions du monde, et de nous-même, et de nos relations sociales. Cette perception a évolué depuis, la science "racisée" ne fut qu'une étape dans l'évolution des sciences en général. Notre société actuelle, bien que toujours primitive, en particulier sur ces deux points spécifiques, a changé de point de vue depuis, et il me parait inutile de juger a posteriori des réflexions scientifiques antérieures de plusieurs siècles sur leur caractère raciste ou sexiste, quand elles sont, par ailleurs, responsables de profonds changements des paradigmes alors communément admis (en particulier, la filiation de l'Homme et des Primates).

Il ne faudrait pas que nous articulions nos recherches scientifiques actuelles ou futures autour de ces deux axes sociaux, il faut au contraire que nous y soyons imperméables, c'est-à-dire que nous ne prenions pas ces sujets en considération de par leur nature fondamentalement sociale et non scientifique. Nous avons déjà établi scientifiquement que nous faisons tous partie de la même espèce (Homo sapiens), quelle que soit notre ethnie d'appartenance. Si les hommes font subir du harcèlement aux femmes scientifiques, c'est un problème social, pas scientifique, puisqu'il se retrouve dans tous les domaines de nos sociétés. Ne laissons plus des problèmes sociaux dicter l'orientation de nos sciences : nous avons probablement perdu deux millénaires d'avancées scientifiques à cause du musellement religieux. Il ne s'agit pas de laisser les scientifiques dire que l'homme est supérieur à la femme, il s'agit de s'appuyer sur des faits démontrables et indubitables, quel que soit le postulat.

Il est évident que nous ne pourrons pas évoluer davantage sans une éducation plus importante des individus dans les domaines scientifiques. Pas dans un but académique, mais simplement dans le but de disposer d'une culture générale plus vaste, culture qui servirait à éduquer et intéresser nos enfants qui absorberaient ces connaissances, et leur servirait de base pour leur apprentissage futur. Ainsi, chaque génération contribuerait à augmenter le pool de connaissances de base de la génération suivante, qui l'enrichira au fil des ans, et le transmettra à sa propre descendance. Exactement comme l'a fait Homo neanderthalensis avec nous, et ses prédécesseurs avant lui.


  1. Claude Ptolémée, Almageste - consulté le 24 janvier 2021. https://data.bnf.fr/fr/12149764/claude_ptolemee_almageste/ 

  2. https://www.nsf.gov 

  3. National Science Foundation. « Science and Technology: Public Attitudes, Knowledge, and Interest NSF - National Science Foundation », 2020. https://ncses.nsf.gov/pubs/nsb20207/data#table-block 

  4. Contributeurs Wikipédia. « Science ouverte », Wikipédia, janvier 2021. https://fr.wikipedia.org/w/index.php?title=Science_ouverte&oldid=179154353 

Sommaire