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Vous vous en doutez, ma conclusion sera : nous sommes primitifs. Nous avons perdu beaucoup de temps avec le commerce, la religion et la surpopulation. Plus de deux mille ans qui, s'ils avaient été entièrement dédiés à l'accroissement de nos connaissances, auraient pu permettre de résoudre, voire éviter, bien des problèmes de notre temps.
La science s'est affranchie de la religion. L'étape suivante, pour que l'espèce humaine continue sa progression, sera la suppression de l'argent et du travail, qui supprimera de fait la plus grande partie des inégalités sociales. Il en restera toujours (principalement à cause de notre organisation en vastes sociétés), mais au moins nous nous serons débarrassés des plus importantes. Ce qui nous permettra, peut-être, un retour à une humilité oubliée depuis que nous nous sommes considérés comme une création divine. Avec l'humilité devrait également revenir le bon-sens. Nous pouvons faire des choses, c'est-à-dire que nous sommes en capacité technique de les faire, et nous ne nous demandons pas si nous devrions les faire. Prendre sa voiture pour faire cinq cent mètres, raser une forêt, jeter un gobelet en plastique en pleine nature, construire des barrages, harceler une femme en jupe, accuser injustement un homme de pédophilie, tout cela, nous sommes techniquement capables de le faire, et nous osons brandir l'étendard de la liberté et du progrès pour le justifier, alors que c'est "juste" manquer de bon-sens, c'est-à-dire l'instinct primaire que nous avons abandonné alors qu'il nous permettait d'être en symbiose avec notre environnement, sans interférer avec lui négativement.
Si nous regagnions notre bon-sens, nous devrions donc dans le même temps réparer nos rapports sociaux, complètement dysfonctionnels à l'heure actuelle, et nous n'aurons pas besoin d'un pansement sur une jambe de bois, concocté par des pseudo-sciences, pour y remédier. Nous pourrions même réparer, reconstruire, voire créer des relations sociales avec d'autres espèces, ici-même, sur "notre" Terre. Nous pourrions retrouver un intérêt pour des sociétés dont les plus urbains ignorent jusqu'à l'existence, des sociétés complexes, mises en évidence notamment par l'immense Jane Goodall chez les chimpanzés, nos plus proches cousins génétiques, qui a travaillé auprès d'eux depuis 1960, à qui l'on doit de profond changements dans notre perception des autres Primates, au point d'avoir laissé son empreinte sur le Disque d'Or de Voyager. Nous pourrions trouver un moyen d'échanger, autrement que commercialement, avec d'autres cultures, avec des sociétés qui ont fait le choix de ne pas vivre selon notre mode de vie occidental, nous leur serions plus accessibles, et elles nous seraient plus accessibles. Nous n'exclurions plus les Autres comme nous le faisons actuellement. Nous n'aurions plus cette idée surannée que nous n'avons plus rien à apprendre, que nous sommes bien plus "civilisés" que ces sociétés "primitives" non-capitalistes.
Nous n'aurions plus à demander à la science de réparer nos dégâts sociaux, et elle pourrait enfin se focaliser sur son but premier : nous instruire, nous faire évoluer, nous permettre de créer des énergies plus efficaces, n'ayant aucun impact sur l'environnement, des moyens de communication et de transport plus performants, qui nous permettraient de maintenir un contact permanent avec des mondes distants.
Nous devons nous poser la question : que voulons-nous pour notre avenir ? Qu'en attendons-nous ? Allons-nous rester égoïstes en ne pensant qu'à notre propre génération, peut importe ce qu'il advient à notre mort, ou choisirons-nous plutôt la voie de la modernisation ? Allons-nous complètement abandonner toute forme de réflexion au motif que ce n'est pas "fun" ? Allons-nous rester passivement, paresseusement à attendre de voir ce qui va se passer, en se disant qu'on ne peut rien changer à rien ? Allons-nous continuer de ne nous préoccuper que de nous, sans aucunement prendre en compte notre impact sur absolument et littéralement tout le reste ? Allons-nous simplement attendre que la science trouve encore des façons de plus en plus explicites de nous prouver que nous sommes dramatiquement primitifs et égoïstes, ou allons-nous plutôt agir pour que cela n'arrive pas ? Notre évolution ne passera pas que par la science. Les scientifiques avancent, mais la société dans son ensemble le doit aussi pour que Homo sapiens progresse. Nous sommes une somme des connaissances et des évolutions physiques des espèces depuis la bactérie, et d'autres de ces sommes existent, ici et sûrement ailleurs. Allons-nous systématiquement nous enfermer dans un système martial avec elles (au risque de les faire disparaître ou de disparaître nous-mêmes), ou voulons-nous partager, échanger, évoluer ensemble ? Pourquoi, aujourd'hui, continuerions-nous de faire des choix destructifs plutôt que constructifs ? Par paresse ? Par égoïsme ?
En fin de compte, et c'est le message que j'essaye de faire passer : ne nous laissons plus aller à la simplicité des mauvais choix. Affrontons la complexité et résolvons-la. Nous nous entêtons à ne faire que de mauvais usages de ce que l'on apprend depuis deux mille ans. Consacrons les deux mille années suivantes à des usages positifs, enfin dans un but évolutif, et non plus destructif.